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Approche Jones lors de l’ALGO-NEURO-DYSTROPHIE DU MEMBRE SUPERIEUR

 

Par Jonathan WOSINSKI

Approche Jones lors de l’ALGO-NEURO-DYSTROPHIE (SDRC) DU MEMBRE SUPERIEUR

Cet article poursuit la série consacrée à l’approche thérapeutique développée par Lawrence Jones

(1). Il ne s’agit pas d’un traitement exhaustif, plutôt de pistes de réflexion, que nous vous encourageons à adapter à chaque patient grâce à un raisonnement clinique structuré.

Algoneurodystrophie : définition et mécanismes

L’algoneurodystrophie est un syndrome douloureux régional, pouvant cumuler des signes vasomoteurs et trophiques. La pathologie présente une phase chaude inflammatoire, puis une phase froide dystrophique. L’évolution est spontanément favorable, mais parfois longue (plusieurs mois).

Ses mécanismes ne sont pas encore complètement élucidés. Cependant, un dérèglement du système nerveux autonome (SNA) semble impliqué, impactant la vasomotricité (œdème et hyperhémie). (2)  L’état inflammatoire local serait donc dépendant d’une influence centrale (calibre vasculaire contrôlé par le SNA). (3)

Dès lors, il semble que travailler à la réduction du symptôme (douleur) pourrait être envisagé selon deux axes :

Par un abord local grâce aux techniques rééducatives habituelles et aux techniques de physiothérapie antalgiques dans leur domaine d’utilisation connu et validé ; Et également de manière centrale, en essayant d’avoir une action physique -mécanique- sur le SNA, dans l’espoir de normaliser son fonctionnement pour améliorer les perturbations vasculaires responsables du symptôme.

L’abord local étant maîtrisé par les kinésithérapeutes, c’est cette piste centrale que nous nous proposons d’explorer ici, en nous concentrant sur le cas des SDRC du membre supérieur.

Traitements rééducatifs actuels

A ce jour, la priorité est de minimiser la phase chaude inflammatoire. Puis, en phase froide dystrophique, on cherchera à limiter l’enraidissement articulaire. En utilisant (entre autres) la physiothérapie antalgique, les mobilisations, la remise en charge progressive, l’exposition graduelle (4), etc…

Toutefois, si travailler localement est indispensable, il apparaît cliniquement que cette approche seule est insuffisante dans le cas de l’algoneurodystrophie.

Pour espérer réduire le temps d’évolution de la pathologie, il paraît essentiel d’essayer de limiter la phase chaude inflammatoire ! Bien que le travail local soit compliqué par l’inflammation, il est possible de travailler à distance, en cherchant à avoir une action sur le SNA.

D’autant plus que dans le cas d’algoneurodystrophie du membre supérieur, il semblerait que la réalisation de blocs stellaires en péri-opératoire d’une chirurgie de membre supérieur chez des patients ayant un antécédent l’algoneurodystrophie aurait un effet préventif sur la survenue d’une récidive. (3, 5)

Envisageons un traitement central !

Bien qu’essentiel, un travail exhaustif des structures anatomiques composant le SNA serait trop long à développer ici (nous vous invitons donc à consulter la littérature spécialisée sur le sujet).

Cependant, certaines techniques clés sont très efficaces et possibles à utiliser sans risques pour le thérapeute comme pour le patient ! Nous en avons choisi 4, destinées à des structures anatomiques pouvant exercer une « tension » mécanique sur le ganglion stellaire et perturber son fonctionnement (6). (Liste non exhaustive mais qui constitue un bon début pour un abord mécanique du SNA destiné au membre supérieur).

La clinique tend à montrer que la bonne fonction du ganglion stellaire dépend de la liberté mécanique des structures suivantes :

–  Première côte  Approche Jones du ganglion cervico-thoracique 

–  Muscles scalènes

–  Muscle subclavier (tire sur la première côte)

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique

(Source de l’image : « Google image »  Saad R., Sibai N. (2019) Stellate Ganglion Block. In: Abd-Elsayed A. (eds) Pain. Springer, Cham) 

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique

L’objectif est donc d’améliorer la mobilité des structures anatomiques pouvant gêner le fonctionnement du ganglion stellaire. Pour y parvenir, nous utiliserons à nouveau la technique Jones (Counterstrain), pour la suite de cette série qui y est consacrée (1, 7).

Cette technique présente deux avantages importants : indirecte, elle cherche à placer le patient en position de confort, respectant de fait la règle de non-douleur.  De plus, elle est réalisée à l’aide de mobilisations passives précédant une phase de reprogrammation et d’exposition graduelle. Elle s’intègre donc efficacement dans le champ de compétences du kinésithérapeute.

Une fois la technique réalisée, les marqueurs de traitement devraient être améliorés. Ceux-ci peuvent être subjectifs (perception de la douleur), ou objectifs (amplitude articulaire améliorée réévaluée dans le temps par exemple). Il est bien sûr indispensable de les utiliser pour évaluer la pertinence et l’efficacité du traitement. (8, 9).

Dans le premier article de cette série (1), les principes d’application de la technique Jones ont été décrits. Nous vous renvoyons vers cette description pour comprendre les notions de Tender Point (cartographié), de position de confort et de relâchement tissulaire.

La règle des 90’’ et le retour lent en position neutre s’appliqueront également ici.

AR1 : Anterior Rib 1 

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique 

Tender Point :

Cartilage costo-chondral de la première côte, juste sous le bord médial de la clavicule, et latéralement au manubrium. Pression postérieure.

Traitement :

Patient en décubitus dorsal. Flexion moyenne du rachis cervical. Rotation marquée vers le TP. Inclinaison vers le TP (composante la plus marquée). « Le menton du patient pointe vers le TP ».

PR1 : Posterior Rib 1 

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique 

Tender Point :

Sur la face supérieure de l’arche postéro-latérale de la première côte, juste antérieurement au muscle trapèze. Pression inférieure.

Traitement :

Patient assis, creux axillaire opposé au TP reposant sur la cuisse du thérapeute (facultatif).  Inclinaison légère du tronc à l’opposé du TP. Extension cervicale légère. Inclinaison légère opposée au TP. Rotation modérée vers le TP.

SCL : Scalenius

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique 

Tender Point :

Dans le corps du Scalène correspondant, antérieur, moyen ou postérieur.

« Gratter » dans le corps musculaire à la recherche d’un cordon musculaire.

Traitement :

Patient en décubitus dorsal. Flexion cervicale modérée. Inclinaison vers le côté du TP. Rotation à l’opposé du TP (scal. antérieur et moyen)/vers le TP (scal. post.).

SUBC : Subclavius

Approche Jones du ganglion cervico-thoracique 

Tender Point :

Sous la face inférieure de la clavicule, en sa partie moyenne. Pression postéro-supérieure.

Traitement :

Patient en décubitus dorsal, thérapeute du côté opposé au TP. Adduction du bras du côté impliqué, qui croise le tronc. Rotation médiale du bras via une prise au poignet/avant-bras distal pour le réglage fin.

Ces techniques ne constituent pas un traitement systématique à elles seules : bien que les points présentés ici soient très utiles réalisés isolément, leur efficacité sera encore plus grande une fois intégrés à un raisonnement complet envisageant le corps dans sa totalité.

Cependant, elles ont démontré cliniquement une efficacité intéressante sur la réduction de la perception douloureuse par les patients souffrant d’algoneurodystrophie, et auront – nous l’espérons – une place de choix au sein de votre arsenal thérapeutique.

Pour en savoir plus : 

Jones Classic (Formation présentielle)

Traitement médical et kiné du SDRC (Formation en ligne hors cursus Jones)

Bibliographie 

(1) : « Traiter l’épicondylite par l’approche en Counterstrain Jones ». Bulle D et al, Vous Kiné 2019 ; 46-48

(2) : www.medecine.upstlse.fr/DCEM2/module13/2010/M13_Item_221_Algoneurodystrophie.pdf

(3) : « Algodystrophie ou SDRC I : Mise au point ». Lauwers A, Koenig M, Navez M, Cathébras P. MT.  Vol.12. Mars-Avr 2006 ; 108-116

(4) : Graded exposure for chronic low back pain in older adults : a pilot study » Corinna Leonhardt et al, J Geriatric Physical Therapy 2016 ;00 :1-9

(5) : Reuben SS, Rosenthal EA, Steinberg RB. Surgery on the affected upper extremity of patients with a history of complex pain regional syndrome: a retrospective study of 100 patients. J Hand Surg [Am] 2000 ; 25 : 1147-51.

(6) : « Mechanobiology and diseases of mechanotransduction ». Ingber D. Ann med 2003 ; 35 : 1-14

(7) : « Jones Strain-Counterstrain » Jones L, Kusunose R, Goering E ; Ed. Counterstrrain, 1995

(8) : « Strain Counterstrain, du nouveau dans l’approche du Dr Lawrence Jones, partie 1 » Saphy P et al, Profession Kiné 2015 ; 49 : 39-42

(9) : « Strain Counterstrain, du nouveau dans l’approche du Dr Lawrence Jones, partie 2 » Saphy P et al, Profession Kiné 2016 ; 50 : 33-36

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